Par Francisque Jean-Charles, 28 février 2023 Les Taïnos-Arawacks n’habitaient-ils pas paisiblement Aï-ti, Bohio ou Quisqueya, haut-lieu sacré, le 6 décembre 1492 lorsque les Euro-chrétiens espagnols sous le leadership du spadassin Christophe Colomb l’envahissaient pour esclavagiser et piller les matières premières ? La République Dominicaine n’existait pas, n’est-ce-pas ? Colomb s’écria : « C’est une merveille », planta la croix du Christ et la nomma Hispaniola.1 Sous l’exigence de Francisco Rolden, chef des insurgés, les Aborigènes sont réduits en servitude et  distribués par lot aux insurgés. L’esclavage fut ainsi créé à Hispaniola par l’asservissement de la population indigène laquelle fut rapidement exterminée.2 La transplantation de quatre mille nègres d’Afrique vers 1517 sous la demande du père Bartolomé de Las Casas à Hispaniola n’accepta pas l’esclavage et se battait corps et âme aux côtés du dernier cacique indigène Henri pour leur liberté. Ce dernier conclut un traité de paix en 1533 avec l’empereur Charles-Quint pour lui et ses hommes, hormis les Africains, pour aller vivre en pleine liberté à Boya, à quelques kilomètres de Santo Domingo.3 Les Euro-chrétiens espagnols, trente ans après leur envahissement, furent troublés dans leur conquête. Des aventuriers marquèrent leur présence dans la grande partie occidentale de l’Ile et finirent par établir leur quartier général permanent à l’île de la Tortue. Les Espagnols, établis dans la partie orientale de l’île Hispaniola, n’arrivèrent pas à chasser ces aventuriers. Et la France en profita pour l’établissement d’un empire colonial dans les Antilles.4 Louis XIV, roi de France décida intentionnellement de diriger l’ile Hispaniola et appela son ministre des finances Jean-Baptiste Colbert, partisan de l’expansion coloniale de la France, fonda la Compagnie des Indes Occidentales et lui octroya pour une durée de quarante ans. Annuellement, ils y débarquèrent de vingt à trente mille noirs enlevés des côtes d’Afrique. Cette importation massive de « bois d’ébène » effraya le gouverneur de Cussy qui craignait que la population blanche ne soit à un certain moment noyée dans la grande masse noire.5 La séparation de l’île Hispaniola Très loin de l’île Hispaniola, il y avait une guerre qui fut le résultat des provocations de Louis XIV annexant en pleine paix de nombreux territoires allemands. Le 20 septembre 1697, un traité de paix entre la France et les Provinces-unies, l’Angleterre et l’Espagne, est signé pour mettre fin à la guerre de la ligue d’Augsbourg.6 De l’autre côté de l’Atlantique, l’Espagne dut reconnaitre l’occupation par la France de l’Ouest de Saint-Domingue (pars occidentalis), île située dans les Antilles. Cela permit à la France de devenir le premier producteur mondial de sucre dans les années 1740, le sucre étant une denrée fort chère et exportable.7 L’île Hispaniola est partagée en deux, la plus grande partie orientale est à l’Espagne comme la plus petite partie occidentale est à la France par les Traités de Ryswick en 1697. Mais ces deux intrus, assassins, pilleurs et esclavagistes français et espagnols signaient finalement le Traité de Bâle le 22 juillet 1795 cédant la partie orientale de l’île à la France après le revirement de Toussaint Louverture qui laissa le camp espagnol où il était le général de l’armée du Roi d’Espagne pour passer au camp français devenant le premier leader noir à avoir vaincu les forces d’un empire colonial européen. On peut conclure que l’île de Saint-Domingue est désormais française.8 Toussaint Louverture surnommé Fatras Bâton proclamé « le bienfaiteur de la colonie »9 et étant gouverneur général de l’île de Saint-Domingue promulgua la Constitution de 1801 et le 28 janvier 1801 décida de procéder à l’unification territoriale et, par ses efforts, arriva à instaurer la paix civile dans l’île.10 Le 18 novembre 1803, les Africains et les Créoles chassèrent les Français en bossant les fesses de la plus puissante armée du monde à Vertières le 18 novembre 1803. Et le premier janvier 1804, sur la place d’armes aux Gonaïves, les généraux sous le leadership de Jean-Jacques Dessalines proclamèrent l’indépendance de l’île pour devenir le premier état noir libre du nouveau-monde. À partir de cette date fatidique, toute l’île de Saint-Domingue, désignée désormais sous le nom d’Hayti, appartient aux Haytiens. D’où est venue sur la partie de l’Est, la République Dominicaine ?11 La République Dominicaine est-elle un territoire volé aux mains des Haytiens ? L’arrêté de 1805 du général Jean Louis Ferrand, gouverneur français de Santo-Domingo, appelant les habitants frontaliers et les troupes françaises à kidnapper les Haytiens à la frontière  pour les remettre en esclavage, vint fournir à l’empereur Dessalines le prétexte de chasser définitivement les forces françaises encore présente sur l’île d’Hayti et à l’unir sur son autorité.12  L’armée haytienne assiégea les troupes françaises sur la partie orientale de l’île d’Hayti. Dessalines ordonna de brûler les villes de Colui, la Vega et Santiago et on emmena plus de mille captifs, enlevés par l’armée et transférés de force vers la partie occidentale de l’île. L’armée haytienne appelait les captifs de l’Est les « espagnols ». Christophe, Dessalines et d’autres généraux haytiens repartirent les captifs espagnols entre les diverses plantations administrées par l’État dans le Nord d’Hayti.13 Pourquoi, à aucun moment, après la proclamation de l’indépendance de l’île d’Hayti, aucun des quatre dirigeants haytiens, Dessalines, Pétion, Christophe et Boyer n’avaient-ils jamais pensé à faire des deux parties de l’île un État unitaire ? Pourquoi une telle négligence outrancière de toute une panoplie de génies tels que Juste Chanlatte et Boisrond Tonnerre qui ont rédigé et promulgué la Constitution Impériale de 1805 ? Comment Henri Christophe, le grand bâtisseur du Royaume du Nord n’avait-t-il jamais pensé à intégrer la partie orientale de l’île d’Hayti dans son administration qui fut un grand gestionnaire des choses publiques ? Nos dirigeants ancestraux, surtout Alexandre Sabés Pétion et Henry Christophe, par ambition de pouvoir politique et déchirés par des luttes internes ont livré volontairement la plus grande partie (2/3) de l’île d’Hayti au pays qui allait devenir la République Dominicaine en 1844. Quelle perte immense pour l’île d’Hayti ! La partie orientale de l’île d’Hayti se replaça volontairement sous l’autorité de l’Espagne le 9 juillet 1809. La période entre 1809 et 1821 est connue comme celle de « La Espaňa Boba », littéralement de la stupide Espagne, puisque ce pays, désintéressant d’une colonie aux ressources épuisées, n’y exerçait pratiquement aucun pouvoir.14 José Nunez de Caceres proclama l’indépendance de la partie orientale de l’île de l’Espagne sous le nom « Republica del Hayti-Espagnol » (République de Hayti Espagnol) le 30 novembre 1821 en demandant son admission à la République de Grande Colombie neuf semaines plus tard. Le drapeau de la Grande Colombie fut hissé dès les premières semaines de 1822.15 Le 9 février 1822, le président Jean-Pierre Boyer dissout cette république par une heureuse fusion des deux grandes régions du pays sous un même gouvernement républicain ; malheureusement, l’annexion de la partie de l’Est par le président Boyer fut simplement une occupation militaire jusqu’à sa chute le 13 mars 1843.16 Et la République Dominicaine proclama officiellement son indépendance le 27 février 1844, profitant d’une grave crise politique pour s’émanciper. Malgré les attaques incessantes tentées par les gouvernements haytiens en 1844, 1845, 1849 et en 1853 et en 1855-56  pour reprendre la partie orientale, mais en vain. En 1859, enfin, la chute de Faustin Soulouque met fin aux tentatives de l’État haïtien de conquérir la partie orientale de l’île.17 En mars 1861, une dernière opportunité faufila à l’horizon pour l’annexion de l’île d’Hayti mais le président du Concordat de 1860 Nicolas Fabre Geffrard n’avait pas pu le saisir. À la demande du président dominicain, le général Pedro Santano, l’Espagne ré-annexa officiellement Saint-Domingue en raison des pressions importantes d’Hayti. Ce rattachement est contesté par des patriotes dominicains le 16 août 1863, la guerre de restauration éclata et les rebelles établissaient un gouvernement provisoire décidaient de se battre contre la ré-annexation.18 Les troupes espagnoles reprenaient Saint-Domingue et les rebelles fuyaient vers les montagnes dans la zone frontalière mal définie avec Hayti. Le président haytien Geffrard offrait Hayti aux rebelles comme un centre de résistance et des armes et envoya même un détachement de ses gardes présidentielles (les tirailleurs) pour se battre aux côtés des rebelles dominicains.19 Quand la Guerre de Sécession termina en mars 1865 aux États-Unis, la reine Elizabeth II annula l’annexion et l’indépendance est par conséquent restaurée avec le départ des dernières troupes espagnoles le 10 juillet 1865. La République dominicaine restera indépendante comme Juan Pablo Duarte l’avait voulu et continua de jouir sa pleine liberté sans interférence étrangère.20 Conclusion Le traité de Ryswick signé en 1697 où la France partagea la partie orientale de l’île de Saint-Domingue avec l’Espagne s’est ipso facto interrompu en 1795 lorsque le traité de Bâle fut signé par ces deux pays en guerre après cette raclée donnée par Toussaint Louverture comme le général des armées du roi d’Espagne qui, a fait un revirement pour devenir le général de l’armée française, l’Espagne abandonna l’île de Saint-Domingue. Le 28 janvier 1801, Toussaint Louverture procéda à l’unification de l’île afin21 « d’étendre son autorité et son idéal de liberté sur l’île entière » et le 1e janvier 1804, l’île de Saint-Domingue est devenue l’île d’Hayti. Pourquoi nos premiers dirigeants n’avaient-ils jamais pensé à un État unitaire sur l’île d’Hayti en 1804 et sur l’Empire d’Hayti en 1805 ? Serait-ce une exagération de responsabiliser nos pères-fondateurs sur une telle négligence outrancière ? Pourquoi ni les empiristes de 1805 et de 1852 ni les républicains de 1806, 1820 et 1861 ne recouvraient-ils pas toute l’étendue du territoire national ? Où  était-il destiné à ce que la partie orientale de l’île d’Hayti devienne inévitablement la République de Saint-Domingue ? L’ambition d’un État souverain était certes dans la caboche des pères fondateurs et des tentatives de réunification avaient été tentées mais aucun d’eux n’avait pensé à un État unitaire, à savoir, l’île d’Hayti sous le leadership d’un empereur, d’un roi ou d’un président d’Hayti. Tous les forts étaient construits dans la partie occidentale de l’île d’Hayti, en particulier, dans le Grand Nord, par peur d’un éventuel retour de l’armée française. Qu’avaient fait les pères-fondateurs pour sécuriser la partie Est si  l’ennemi mortel décidait d’envahir par Santo Domingo ? Quelle naïveté ! Quelle stupidité ! En 1822, l’historien Jaime de Jésus Dominguez22, confirma que c’était le président Jean-Pierre Boyer qui avait mis fin à l’esclavage lors de la réunification de l’île. Une preuve additionnelle qui justifie la fondation de cet État unitaire était ni une réalité ni une priorité pour nos premiers dirigeants. Tout compte fait, aimables lectrices et lecteurs, portez votre propre jugement sur cet  état de fait. Nos ancêtres ont combattu trois armées européennes à Saint-Domingue, espagnole, anglaise et française, pour nous léguer l’île entière et nous avons malheureusement bénéficié un tiers de cet héritage. Les dominicains, un peuple assez intelligent et clairvoyant, à travers Juan Pablo Duarte s’associa avec le mouvement de Praslin mené par Charles Rivière Hérard pour renvoyer Boyer. Duarte trahit la confiance des révolutionnaires haytiens et proclama l’indépendance le 27 février 1844. Dés-attachement ou destin, peu importe, le peuple dominicain en occupe les deux-tiers de l’est de l’île de fait et en a fait bon usage au point de vue politique et économique abandonné par les premiers dirigeants de l’île d’Hayti. Dans les années 1970, le président dominicain Joaquin Ballaguer voyait Hayti comme un modèle pour son pays mais depuis 1992, la République dominicaine est devenue un joyau et Hayti un enfer. De nos jours, c’est avec déchirement et désenchantement qu’un patriote haytien assiste à la maltraitance de ses confrères et consœurs en territoire voisin. Sans hésitation aucune, on se demande perplexe, pourrait-on reprendre un jour cette partie de l’île d’Hayti pour laquelle nos ancêtres ont battu corps et âme ? Si jamais un dirigeant loufoque prendrait la décision de reconquérir les deux-tiers de l’Est de l’île devenue la République Dominicaine depuis 1844, Hayti, à ce moment précis, livrerait une guerre contre le monde. Depuis des lustres, la mère-patrie est ostracisée par les nations malveillantes telles que les États-Unis, la France et le Canada, citez-en un pays qui a levé un doigt pour nous défendre. Aucun, alors que Simon Bolivar, dans ses lettres, décrivait Hayti comme « l’asile de tous les républicains ». Hayti doit compter sur ses filles et fils en tout, malgré ses largesses, presqu’un pays ou chef d’État ne lui a retourné l’ascenseur. Entre-temps, Jorge Grullòn a fait cette déclaration sur Hayti : « Terroristes haytiens, combattez-les, ils sont nos ennemis. Séparer par un mur les deux nations pour assurer et protéger notre souveraineté. Nous ne sommes pas des Haytiens ». Jugez-en vous-mêmes compatriotes. Francisque Jean-Charles, 28 février 2023 Références bibliographiques 1. Dantès Bellegarde. 1953. Histoire du peuple haïtien (1492-1952). 2.https://docplayer.fr › 68263706-Histoire-du-peuple-hait… 3. Dantès Bellegarde. 1953. Histoire du peuple haïtien (1492-1952). 4. Dantès Bellegarde. 1953. Histoire du peuple haïtien (1492-1952). 5. Dantès Bellegarde. 1953. Histoire du peuple haïtien (1492-1952). 6. https://fr.vikipedia.org 7. https:/fr.m.wikipedia.org 8. https://books.openedition.org 9. http://www.manioc.org 10. http://www.humanite.fr 11. https://mjp.univ-perp.fr 12. https://www.haitianaute.com 13. https://island-luminous.fiu.edu. John Henry Gonzalez (1805). L’invasion de l’Est par Dessalines. 14. https://www.duhoctrungquoc.vn › 15. https://www.lepetitjournal.com › haïti 16. Dantès Bellegarde. 1953. Histoire du peuple haïtien (1492-1952). 17. https://books.openedition.org 18. https://fr.vikipedia.org 19. https://fr.vikipedia.org 20. https://www.herodote.net

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